L'une des forces de Caïd, c'est son histoire. Là où les séries françaises sont injustement critiquées, accusées d'un manque d'originalité ou de prises de risques, la fiction de Netflix nous plonge dans une aventure digne de Power. Au programme ? Franck, réalisateur de clips, et son cameraman sont invités dans le sud de la France afin de suivre Tony, un jeune rappeur qui monte en puissance. Problème, la situation se dégrade progressivement, la faute à la double vie menée par l'artiste.
Et pour cause, quand il ne fait pas de la musique, Tony gère un business illégal qui lui fait prendre une facette bien plus sombre. Une activité aussi dangereuse qu'inquiétante qui s'invite soudainement dans le documentaire quand une guerre des gangs éclate sous les yeux de Franck.
Simple sur le papier, ce concept - qui se permet tout de même quelques critiques bien senties, notamment sur la pression des producteurs/labels qui misent sur le buzz afin de vendre toujours plus - se révèle ultra efficace une fois mis en scène à l'écran, ne nous laissant aucune occasion de respirer.
Il faut dire que Nicolas Lopez et Ange Basterga (les deux réalisateurs) ont décidé d'offrir à cette intrigue la réalisation la plus adéquate. Afin de surfer sur le mode documentaire de Caïd, toutes les images sont filmées en caméra embarquée pour accentuer le côté found footage. Un choix qui n'est pas sans défaut (ça décrédibilise parfois l'action, il faut du temps pour s'habituer aux secousses et au rythme de l'image), mais qui se révèle payant.
A travers cette mise en scène, l'immersion est ainsi totale et on se sent réellement embarqué dans cette course à la survie. On ressent véritablement la crainte des personnages, la tension, le désespoir, la violence et la fatalité d'une telle situation. Impossible de rester indifférent à ce qu'il se passe sous nos yeux. Et le point bonus avec cette réalisation, c'est qu'elle permet à Caïd d'éviter de jouer sur les clichés malgré son propos. En nous enveloppant dans une bulle bien précise, elle nous épargne ce faux recul habituel qui rabat toujours la même chose sur les cités. Ici, on vit ce qu'il se passe à l'écran et c'est tout ce qui compte à l'instant T. Bien évidemment, la série veut raconter quelque chose, mais elle ne tente pas de le faire avec de gros sabots gênants, ce qui rend son message plus digeste.
A ce sujet, mention spéciale au format des épisodes (la durée varie entre 8 et 16 minutes) qui facilite grandement cette ambition. C'est déstabilisant, parfois frustrant, mais ça renforce ce côté direct où l'essentiel est priorisé.
Enfin, il est à noter que Caïd arrive, malgré son format et sa réalisation, à nous offrir des personnages intéressants. Comme le reste de la série, ça n'est jamais parfait, mais il est agréable de suivre des héros loin d'être linéaires, mais qui sont au contraire portés par des envies fortes et sincères qui entraînent forcément des conséquences.
De même, les personnages secondaires ont une vraie place à l'écran, comme la soeur ou le frère, ce qui permet à l'histoire de prendre une dimension supplémentaire et d'ouvrir ce monde que l'on ne nous présente qu'en plans serrés.
Caïd est actuellement disponible sur Netflix.