NUDES : le titre est choc, et le programme qui l'accompagne l'est tout autant. Un nude, c'est une photo de son intimité que l'on envoie, généralement à son mec, sa meuf, ou tout simplement un(e) "sexfriend". Mais derrière ce geste insouciant se dévoilent bien des enjeux qu'on ignore : mépris pur et simple du consentement, partage abusif sur la Toile, violences diverses, cyberharcèlement, revenge porn, pour ne citer que cela.
Et ce mal-ci frappe violemment la génération Z : la jeunesse d'aujourd'hui, qui se raconte sur TikTok, en snaps et en stories. C'est ce que démontre largement cette toute nouvelle série française à découvrir dès ce 1er février 2024 sur Prime Video. L'espace de dix épisodes au rythme soutenu, NUDES illustre son propos alerte en dédiant trois collections d'épisodes à trois jeunes personnages singuliers : Sofia, Ada et Victor. Trois ados directement concernés par l'envoi de photos dénudées sur Internet... Et ses conséquences.
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Tous concernés, oui, mais chacun à leur façon. Et c'est là la richesse de cette création qui multiplie les points de vue pour mieux sensibiliser et alerter. Mais comment ? On te raconte tout.
Le gros risque entrepris par cette série, qui par sa BO et son esthétique rappelle bien des films et séries teen (tendance La crème de la crème de Kim Chapiron ou le tout récent How to have sex) c'est de sombrer dans le victim blaming : cette idée selon laquelle la personne qui envoie des nudes, ou se retrouve au coeur de photos dénudées, serait responsable de ce qui lui arrive. Une inversion de la culpabilité que NUDES envoie logiquement valser en pleine ère Sex Education et Euphoria. Et fort heureusement d'ailleurs.
Et ce au profit d'une réflexion plus dense qu'on ne pourrait le croire. Car si d'un perso à l'autre les décors et situations se superposent (soirées trop arrosées entre amis, discutes entre potes, couloirs des bahuts, chatting, DM et stories sur Insta) les points de vue, eux, ne sont pas du tout les mêmes. Ainsi, on passera de celui de Victor, tête pensante de BDE responsable de la diffusion de nudes d'une jeune fille, à celui d'Ada, collégienne prise dans la tourmente de manipulations abjectes visant directement son intégrité. Le grand écart.
Et ce côté kaléidoscope permet d'englober le plus possible un enjeu qui dépasse de loin le simple "phénomène" générationnel : c'est d'un vrai problème de société dont il est question. Les nudes sont l'arbre qui cache la forêt. Derrière ces photos dénudées, se dévoilent violences sexistes et sexuelles, harcèlement en ligne, slut shaming - le fait de juger la sexualité des femmes et plus particulièrement des jeunes filles.
Il faut dire qu'aux racines de cette série chorale qui parlera tout autant aux darons, on trouve des singularités fortes, comme la personnalité d'Andréa Bescond, cinéaste et militante féministe responsable de la réalisation de quelques épisodes, et à qui l'on doit Les chatouilles, autre récit particulièrement poignant de libération de la parole post-MeToo.
Pour mieux alarmer, NUDES n'hésite pas à nous bousculer, notamment en relatant le récit d'Ada, particulièrement éprouvant à vivre. On soulignera à ce titre la justesse de la série dans sa manière de dépeindre la gen Z, dans ses malheurs certes, mais aussi ses convictions : sororité entre meufs, mobilisations diverses et collages féministes sur les murs du lycée ponctuent cette chronique teen finalement pas si désespérée.
C'est validé.