C'est bien connu, l'équation "Netflix + libido" forme un vieux couple depuis Sex/Life et 365 jours, et cela n'est pas près de s'arrêter. La bien-nommée série érotique Obsession est ainsi venue réchauffer les coeurs depuis sa mise en ligne sur la plateforme le 13 avril dernier en proposant un postulat pas vraiment plus complexe qu'un épisode d'Amour, gloire et beauté : une jeune femme (Charlie Murphy) s'énamoure d'un mec (Richard Armitage), sauf que celui-ci... est le daron de son petit ami. Malaise.
Un pitch simpliste mais riche en dramaturgie, puisqu'en suspens, manipulations et autres jeux de mains, jeux de vilains. Un brin moins romantique que L'amant de Lady Chatterley (autre production Netflix parfaite pour les soirs d'hiver) mais pas moins efficace dans son genre. Surtout quand on pense au coeur du projet : le sexe. Car Obsession n'a rien de ringard quand il s'agit de représenter la chose à l'écran.
Et pour cause : la série la plus chaude du moment a nécessité l'apport d'une coordinatrice d'intimité. Un rôle qui a beaucoup influé sur la teneur des séquences les plus intimes. On vous explique pourquoi.
Pour rappel, une coordinatrice d'intimité, c'est tout simplement une chorégraphe chargée de s'assurer que le tournage des scènes de sexe pour le grand ou le petit écran se déroule au mieux. Autrement dit, que le consentement est respecté, qu'il n'y a pas de malaise entre les acteurs, et une vraie compréhension sur ce qui doit être tourné, et comment. Nécessaire, quand on sait que les films les plus hot, comme Basic Instinct et sa fameuse scène d'interrogatoire, n'ont pas toujours respecté la volonté de leurs actrices...
Employée à l'origine dans les productions théâtrales, la "coordination d'intimité" a ces dernières années investi des séries à succès. Parmi les plus connues, Normal People, le succès surprise de la BBC avec Paul Mescal et Daisy Edgar Jones. Et dans le cas de Obsession, c'est la coordinatrice Adelaide Waldrop qui s'est occupée d'apporter son regard à ces séquences impudiques. Pourquoi ? Car il y est question de BDSM, et que la principale concernée ne souhaitait pas sombrer dans les excès très nanar de 50 nuances de Grey (oui, ça dénonce).
"Il fallait vraiment réfléchir à la 'narration sexuelle' de la série : j'ai constitué tout un dossier de recherche sur les relations sadomasos, les jeux qu'elles impliquent, jusqu'à me demander à quel point les noeuds des cordes doivent être serrés lors du bondage... Il était important pour moi de représenter authentiquement ces personnages, leur langage physique, leur chimie sexuelle", s'est ainsi expliquée Adelaide Waldrop auprès de Cosmo.
Du cul pas cucul donc mais réaliste, loin des téléfilms ringos qui surgissent parfois sur d'obscures chaînes de la TNT. Là, c'est plutôt l'inédit qui est recherché, et qu'importe si c'est trop cru. "Il s'agit de créer une illusion, comme dans une scène de combat ou une danse. Il y a une scène à l'hôtel où William (Richard Armitage) recherche Anna (Charlie Murphy) et finit par se masturber sur un oreiller qui a son parfum. Et bien cela ne ressemble à aucune scène intime sur laquelle j'ai pu travailler auparavant !", se réjouit encore la coordinatrice.
Et bien, la chorégraphe est comme une réalisatrice. Elle coache les acteurs, les observe, demande à refaire des prises, dans le cadre de scènes généralement tournées en studio. Elle s'informe concrètement sur leurs limites, dicte des directives très précises, mais tout en laissant la porte ouverte à l'impro et à la spontanéité. "C'est un équilibre constant entre ce qui est répété et ce qui est découvert sur le moment", explique la pro.
A Cosmo toujours, celle-ci assure avoir transgressé "ce que nous avons l'habitude de voir en terme de représentations du sexe hétéro". Rien que ça. Il faut dire que cette envie d'envoyer valser les clichés qui encombrent encore le sexe entre mecs et meufs, en rendant la vie au lit plus égalitaire, ou en allant plus loin que la sacrosainte pénétration qui obnubile ces messieurs, constitue un vrai enjeu depuis #MeToo.
Et si tout cela faisait d'Obsession l'anti Fifty Shades ? De quoi plonger les fans de Christian (s'il en reste encore) dans une profonde introspection.
Clément Arbrun