Alors que les candidats de télé-réalité sont de plus en plus nombreux à refuser de faire des placements de produits sur les réseaux sociaux, à l'inverse, la tendance a envahi de plus en plus les films et les séries. Mais le placement de produit sur grand ou petit écran ne date pas d'hier. Il a même plus d'un siècle (si si, c'est vrai). Déjà, en 1895, les frères Lumière faisaient de la pub pour les eaux minérales Evian dans leur film Embarquement. Une technique marketing qui a continué au fil des années, des sagas James Bond, Mission Impossible à Maman, j'ai raté l'avion. Même les clips de musique ont été nombreux à rapidement utiliser ce procédé.
Puis les séries ont rapidement remplacé les films dans le coeur des spectateurs, et les placements de produits se sont donc invités dans les épisodes de Friends, Desperate Housewives ou encore The Big Bang Theory. Même les séries quotidiennes françaises comme Demain nous appartient sur TF1 et Plus belle la vie sur France 3 font des placements de produits pour des marques de voitures, des marques de crèmes ou même pour des marques de confitures. Une technique de publicité qui s'est encore intensifiée avec l'arrivée des des plateformes de streaming comme Netflix, Amazon Prime Video, Disney+ ou encore Apple TV+.
Par exemple, Stranger Things sur Netflix a toujours fait la part belle aux placements de produits. En dehors de Burger King devant lequel Eleven (Millie Bobby Brown) et Max (Sadie Sink) s'arrêtent durant leur sortie au centre commercial dans la saison 3, plusieurs marques ont souvent sollicité la série à succès pour leur faire de la pub. Et l'une d'elles, c'est Coca-Cola. La boisson gazeuse a été mise en avant dans pratiquement chaque épisode de la troisième saison, aussi bien par son héroïne, que par Mike Wheeler (Finn Wolfhard) et sa mère Karen (Cara Buono) ou encore par Lucas (Caleb McLaughlin). Bref, si vous n'avez fait gaffe aux canettes "New Coke" du show, c'est que vous êtes aveugles ou que vous vous êtes endormis devant l'épisode.
D'après PQ Media, aux Etats-Unis, les marques ont carrément dépensé 10 milliards de dollars pour les placements de produits en 2018 (comprenant la télé, les plateformes et les clips musicaux). Un chiffre énorme qui est en hausse par rapport en 2017, où elles avaient déjà dépensé 8,8 milliards de dollars. Des chiffres qui prouvent donc qu'il y en a de plus en plus.
Une idée partagée par Jim Nail (de Forrester, une agence d'analyses), qui a assuré à Business Insider à propos des sites de streaming : "Avec le placement de produits, je m'attends à ce que ça devienne une part importante de leurs activités". Selon lui, les placements de produits ont donc encore de très beaux jours devant eux, en particulier sur Netflix et ses confrères. Pour quelle raison ? "Il y a beaucoup d'argent dans ce domaine qu'ils pourraient facilement exploiter sans se lancer dans la publicité traditionnelle".
En effet, contrairement aux chaînes TV, Netflix, Amazon Prime Video ou encore Disney+ n'ont pas (ou presque pas) de coupures pub. Reed Hastings, CEO de Netflix, avait d'ailleurs affirmé dans une lettre aux actionnaires ne pas vouloir mettre des pubs sur la plateforme : "Si vous voyez des médias qui spéculent sur le fait que l'on se dirigerait vers de l'ajout de publicité, vous pouvez être assurés que c'est faux".
Et les abonnements payants des utilisateurs ne suffiraient pas à financer leurs séries et leurs films. Interrogée par Business Insider, Laura Martin (de Needham & Company, société spécialisée dans les services de conseil) a révélé que 10 millions d'abonnés activeraient et désactiveraient leurs abonnements durant l'année. En clair, ils ne quittent pas Netflix ou Amazon Prime Video mais se mettent en pause pour tester d'autres plateformes de streaming. Eh oui car la concurrence est rude. Entre les films d'animations cultes de Disney qu'on veut revoir (ou même leur catalogue comprenant les Marvel et la Fox), les séries teen de Netflix (comme Sex Education, 13 Reasons Why, Elite...), les séries primées d'Amazon Prime Video (Fleabag, La fabuleuse Mme Maisel...), on ne sait plus où donner de la tête (et quelle plateforme de SVOD payer).
Du coup, les placements de produits intéressent aussi (et surtout) les SVOD puisqu'il faut bien trouver l'argent quelque part. C'est ainsi que les séries pourraient plus que jamais devenir les influenceuses de demain, remplaçant candidat(e)s de télé-réalité et YouTubeurs pour prôner telle ou telle marque.
Le CNC (Centre National du Cinéma et de l'image animée) a même dévoilé qu'aujourd'hui, les placements de produits peuvent représenter jusqu'à 30% du budget total d'un film aux Etats-Unis. Et en France ? Le site a indiqué que cela rapporterait jusqu'à 5% du montant total investi pour produire un long-métrage.
Non seulement les placements de produits se multiplient à Hollywood et ailleurs comme en France, mais en plus, les ventes des produits augmenteraient vraiment lorsqu'ils apparaissent dans une série ou un film en échange d'argent. Par exemple, Business Insider a relayé que Stranger Things a boosté les ventes de Coca-Cola (qui aurait engrangé 1,268 milliards de dollars), Microsoft (qui se serait fait 369 millions de dollars) et H&M (qui aurait cumulé 211,5 millions de dollars) sur une période de 60 jours (soit 2 mois), après la sortie de la saison 3 du célèbre show Netflix.
Amazon Prime Video a même eu la bonne idée de faire évoluer les placements de produits. Comment ? En proposant aux abonnés de gagner l'objet de leur choix présent dans la saison 2 de Jack Ryan. Il vous suffisait alors de repérer le produit que vous désiriez, de le tweeter et de croiser les doigts pour espérer le recevoir. Une belle campagne qui permettait de faire de la pub à la série, au produit et au site de vente. Peut-être que cette technique, déjà présente sur les réseaux sociaux (plusieurs influenceuses mettent directement les liens des e-shops dans les photos de leurs looks du jour), se développera avec le temps sur le petit écran.
A noter cependant que si une marque apparaît dans une série ou un film, cela ne signifie pas toujours qu'elle a payé pour y être. Parfois, des shows mettent des vêtements ou des objets pour plonger le spectateur dans l'époque de l'intrigue. Ces éléments sont alors là simplement pour renforcer la crédibilité de l'histoire. Par exemple, Bandersnatch, l'épisode interactif de Black Mirror, avait demandé aux abonnés de choisir entre Quaker Sugar Puffs et Kellogg's Frosties. Mais Netflix n'avait pas été payée par les entreprises de céréales. La série voulait juste placer l'intrigue dans les années 1980 grâce à ce petit-déjeuner typique des eighties.
En clair, il va falloir vous attendre à voir encore plus de gobelets Starbucks, de smartphones Apple ou encore de burgers de chez McDo dans les prochains épisodes de vos séries préférées, que les marques aient payé ou pas.