Au début, les fringues streetwear se voulaient anti-capitalistes, avaient pour message de lutter contre le système. Jusqu'à ce qu'elles deviennent des vêtements de luxe et ne fassent plus du tout passer l'idée de départ. Rapidement en effet, la mode street s'est emparée des podiums, des stars de tous milieux et des anonymes. A tel point que les collabs entre les marques sportswear et les griffes haut de gamme se sont multipliées avec notamment Louis Vuitton x Suprême, Alexander Wang x adidas, Nike x Dior, Polo Ralph Lauren x Palace, Fendi x Fila et Prada x adidas.
Mais cette ère (bénie, surtout pour la fin du règne des talons chez les femmes) des sneakers, hoodie et jogging semble prendre fin. Comme le rappelle i-D magazine, Raf Simons avait déclaré juste après son défilé printemps-été 2019 : "Nous avons besoin d'une nouvelle silhouette, d'une nouvelle forme. Il y a beaucoup trop de hoodies à imprimés en ce moment. Quelque chose doit changer". Celui qui avait lancé sa marque éponyme en 1995 avec des lignes streetwear stylées avant de passer chez Dior puis chez Calvin Klein avait donc prédit la mort de cette mode décontractée.
Virgil Abloh était lui aussi d'accord avec cette idée. Le fondateur d'Off-White, également devenu directeur artistique chez Louis Vuitton (pour les collections hommes), avait assuré à Dazed : "Je dirais vraiment que le streetwear va mourir". "Il a fait son temps" avait-t-il même expliqué, ajoutant : "Encore combien de t-shirts peut-on avoir, encore combien de hoodies, encore combien de sneakers ?".
Le gourou de Kanye West, Kim K, Bella Hadid et autres stars hypes avait même déclaré un retour en force du vintage, l'industrie de la mode étant la 2ème plus polluante de la planète. Une façon plus économe et plus écolo de s'habiller. "Je pense que l'on va se tourner vers une expression plus personnelle de son style avec le vintage" avait-il indiqué, "Il y a tellement de vêtements cools dans les magasins vintage, il suffit seulement de les porter. La mode va s'éloigner de la nouveauté, ce sera plutôt un retour aux archives".
Et clairement, Raf Simons et Virgil Abloh semblaient ne pas avoir totalement tort. Alors que les survêtements sont aussi bien portés par des rappeurs que des tops ou encore des acteurs et chanteurs, dès l'automne prochain, ce sont les silhouettes classes qui les remplaceront petit à petit. En témoignent les collections hommes automne-hiver 2020 de la Paris Fashion Week, où les mannequins ont troqué leur sweat pour le tailleur.
Que ce soit pour Off-White ou Louis Vuitton, Virgil Abloh a dévoilé des silhouettes classiques avec des costumes et même des mallettes dans les mains. Le vêtement de travail s'était "coolisé", désormais, il revient en arrière (époque années 1960 façon Mad Men) et se veut clairement chic. Même côté performance, le designer n'avait pas fait appel à un danseur de hip hop mais à un danseur-claquettiste (qui fait des claquettes donc) en la personne de Cartier Williams.
Le tailoring a aussi envahi toutes les autres collections de la semaine de la mode, des grandes maisons de luxe comme Hermès et Lanvin, à la jeunesse avant-garde de Jacquemus, en passant par les marques anglaises Paul Smith et Dunhill, ou encore les griffes urbaines telles que Alyx et We11done.
Sur le catwalk donc, les défilés ressemblaient à des hommes trentenaires se rendant dans des bureaux à La Défense. Une nouvelle tendance omniprésente qui confirme que vous pourrez bientôt vendre vos sweats à capuche sur Vinted. Même le fluo a quasiment disparu et apparaît seulement quelques fois, par touches et non plus en total look.
Seule bonne nouvelle pour celle et ceux qui adorent le streetwear : les sneakers en revanche sont toujours aussi tendance. La preuve avec la collaboration Off-White x Air Jordan 5. On se met au tailler, certes, mais on garde les baskets. Un néo-tailoring qui mixe les styles avec goût.