On a beau être le roi du twist - retournement de situation inattendu renversant notre compréhension d'un film - et l'un des plus hitchcockiens auteurs du cinéma américain, désigné il y a vingt ans comme "le nouveau Spielberg" (rien que ça !), on en traîne pas moins de sacrées casseroles.
Ça, c'est le profil de M. Night Shyamalan. Le cinéaste, considéré comme maître du suspens, a beau avoir fait chavirer coeurs et caboches depuis Sixième Sens, sa filmo est loin d'être parfaite. Très loin même. Car par-delà ses chefs-d'oeuvre (Incassable), ses films-choc (Signes) ou ses sympathiques expérimentations (The Visit), subsistent parfois des brouillons. Des films imparfaits. Voire : de grosses catastrophes.
Et de fiascos qui auraient pu mettre fin à sa carrière (et nous priver de l'excellent Trap, aujourd'hui au cinéma), il y en a un que le metteur en scène n'est pas près d'oublier. Il en parle d'ailleurs en interview... Sans chichis.
Alors que son tout dernier tour de force, Trap, a envahi nos salles obscures, M. Night Shyamalan sait que son grand come back sur la scène artistique, établi avec le found footage (remanié) The Visit, puis confirmé grâce au succès de Split, n'était pas vraiment gagné d'avance. La faute à un gros foirage...
Ce ratage que le réalisateur ne parvient pas à oublier, c'est dans un premier temps Avatar : le dernier maître de l'air, l'adaptation live d'un animé hyperculte aux très nombreux fans, mais aussi After Earth, fable de science-fiction vampirisée par un Will Smith bien décidé à imposer ses idées de producteur et star toute-puissante.
Souvenez-vous, sorti en 2013, ce film complètement raté (note moyenne de 12% sur Rotten Tomatoes) voyait Will Smith tenter de nous faire croire que son fis, Jaden Smith, était prêt à lui succéder à Hollywood à travers une histoire... clichée et peu passionnante. "Après un atterrissage forcé, Kitai Raige et son père, Cypher, se retrouvent sur Terre, mille ans après que l'humanité a été obligée d'évacuer la planète, chassée par des événements cataclysmiques, dévoile le synopsis. Cypher est grièvement blessé, et Kitai s'engage dans un périple à haut risque pour signaler leur présence et demander de l'aide. Il va explorer des lieux inconnus, affronter les espèces animales qui ont évolué et dominent à présent la planète, et combattre une créature extraterrestre redoutable qui s'est échappée au moment du crash."
Deux films pas hyper personnels et surtout, intensément déchirés par la critique... A juste titre ? Lors d'un échange avec un journaliste de The Atlantic, relate le site de cinéma Ecranlarge, Shyamalan témoigne : "Je suis tellement nul pour ce genre de films... Que me suis senti vide en le faisant !"
Mais quel est "ce genre de films" qu'évoque le cinéaste ? Simple : des blockbusters. Des grosses machines hollywoodiennes alignant les millions de dollars de budget. Mais aussi, des machines impersonnelles, qui croulent sous les directives de décideurs ayant peut-être un peu trop leur mot à dire.
Un détail qui n'en est pas un dans le cas d'un réalisateur, qui signe quasiment toujours les scénarios de ses films. Ce qui n'est pas forcément synonyme de maestria cependant. On se rappelle ainsi son déroutant egotrip La jeune fille de l'eau avec Bryce Dallas Howard, sorte de réponse à la virulence des critiques, ou à son tout récent Knock at the Cabin, conte moderne au discours très très douteux et au rythme soporifique.
Ouf : Trap bénéficie déjà de meilleurs retours de la part des médias comme du public et devrait, on l'espère, symboliser la grande réconciliation entre l'auteur et ses plus réticents spectateurs...