On ne peut pas retirer à Blanche Gardin une chose : son humour noir dévastateur déjà (distillé dans ses deux one-woman à (re)voir sur Netflix), sa propension à provoquer des réactions ultra exacerbées ensuite. En deux mots, à foutre un boxon pas possible dès qu'elle s'exprime sur un sujet. C'est tout elle. Et c'est avec la prose énervée qui la caractérise que l'actrice est venue détailler sur Facebook les raisons de son refus de participer à l'émission la plus trendy du moment : LOL : qui rit sort, sur Prime Video. Une argumentation qui ne part pas de rien.
A chaque annonce d'une nouvelle saison du programme, les twittos ne se privent pas de balancer les noms de leurs stars rêvées pour enrichir le cast, et celui de Blanche Gardin est beaucoup revenu. L'humoriste aurait carrément été approchée pour participer au show.
Alors pourquoi dire non ? Elle s'explique : "Je serais gênée aux entournures (pour ne pas dire que ça me ferait carrément mal au cul) d'être payée 200 000 euros pour une journée de travail même si je perds à votre jeu, quand l'association caritative de mon choix remporterait, elle, 50 000 euros, c'est-à-dire 4 fois moins, et encore, seulement si je gagne. Oui, ça me gêne de toucher, pour 8 heures de travail, cette somme affolante."
Et l'humoriste de tacler : "Oui, ça me gêne de toucher cette somme de la part d'une entreprise qui ne paye pas ses impôts en France et bénéficie même d'1 milliard d'euros de crédit d'impôts alors qu'elle fait 50 milliards d'euros de chiffre d'affaires, émet 55,8 millions de tonnes de gaz à effet de serre par an, utilise la main-d'oeuvre des camps de concentration ouïghours, détruit les emplois du petit commerce et toute la vie sociale qui va avec".
C'est toute une critique sociale et politique d'un système surpuissant que délivre l'actrice, épinglant au passage "ces entrepôts déshumanisés, où on traite les employés comme des robots qu'on essore en leur mettant une pression folle avec des cadences infernales". Du coup, bien des fans ont salué son "courage" sur les réseaux...
Mais si ces raisons éveillent tout de même en vous une certaine perplexité, pas de malaise : vous n'êtes vraiment pas seul. Sur Twitter, Blanche Gardin a libéré le Kraken et les commentaires critiques démolissant son argumentaire sont légion. Petite revue de tweets ?
"Qu'est ce qui l'empêche de donner l'intégralité de son cachet à l'association de son choix ? Et pourquoi accepter de diffuser ses spectacles sur Netflix si elle déteste les plateformes ?", "Blanche Gardin refuse de participer à l'émission 'LOL' car Jeff Bezos est un vilain capitaliste de merde, par contre la diffusion de son spectacle sur Canal ça lui pique moins le cul, il est vrai que Bolloré est un modèle du socialisme moderne", "Blanche Gardin qui fait celle qui refuse 200K pour participer à LOL parce que ça passe sur Amazon mais qui accepte de vendre ses produits sur.... Amazon", peut-on lire sur Twitter depuis hier.
Oui, on note plus d'énervement que dans une chanson d'Helmut Fritz.
Dans ce flux de réact' on retrouve deux trois catégories récurrentes. Primo, Blanche Gardin aurait très bien pu dire "oui" et "rendre l'argent" (hashtag #FrançoisFillon) à l'association. Deuxio, ses créations (spectacles de stand up, films, livres) sont dispos sur Amazon. Tertio, sa critique de Jeff Bezos et des abus de pouvoir semble quelque peu déplacée de la part d'une artiste qui travaille pour Vincent Bolloré, puisque pour Canal Plus - la chaîne qui a diffusé sa très piquante série, La meilleure version de moi-même.
Des observations qui pour beaucoup sont autant de contradictions desservant sévèrement son discours. Comme d'hab' sur Twitter, les internautes semblent constituer des team entre les pro-Blanche - rappelant que c'est pas plus mal de dénoncer la misère des conditions de travail ou le système capitaliste en général - et les "critiqueurs", même si la parole de ces derniers semble d'autant plus retentir cette fois-ci.
Si Blanche Gardin ne peut pas forcément grand chose à la vente sur Amazon des films dans lesquels elle joue en tant qu'actrice, ou même de ses spectacles, et si l'idée de verser 200 000 euros "net" à une association est une idée un poil plus compliquée que ça en terme de fiscalité, on notera par contre que tout ce discours est curieux de la part d'une artiste qui a pour habitude de clasher sur scène et en interview deux choses : l'indignation et les leçons de morale. E que s'apelerio : la démagogie. Tout ce qu'elle met vachement en avant dans ce discours publié sur Facebook. Paradoxal ?
Dernière chose un brin salée, cette mise en avant très militante des droits humains semble quelque peu ironique pour certains qui se rappellent, notamment, de sa récente défense sur Facebook (toujours) du dessinateur Bastien Vivés, visé par une enquête pour diffusion d'images pédopornographiques, ou encore de ses régulières piques pas forcément très féministes-friendly. Si Blanche Gardin cherchait à faire réagir, c'est réussi.