Sebastian Stan est né en Roumanie, a dû fuir à huit ans la révolution, suivre sa mère jusqu'à New York à douze ans, et a commencé une carrière d'acteur durant sa vingtaine. En 2007, il accède à une petite notoriété grâce à son rôle de bourgeois déchu et manipulateur de Carter Baizen dans la série mythique Gossip Girl. Mais ce n'est qu'en 2011 qu'il parvient véritablement à se faire repérer, lorsqu'il obtient son rôle de Bucky "le Soldat de l'Hiver", dans la saga Captain America, et plus largement dans l'univers cinématographique Marvel.
Pourtant belle gueule, sympathique en interview et l'oeil vif, il écope presque systématiquement des rôles de méchants. Que ce soit en chapelier fou dans Once upon a time, en type violent et sans morale dans Moi, Tonya, en Tommy Lee dans la mini-série controversée Pam and Tommy, Sebastian Stan enchaîne les rôles de vicelard et d'antagoniste. Dans son nouveau film, dont il tient l'affiche avec la casquette d'acteur et de producteur, il continue sur sa trajectoire en interprétant pas moins que Donald Trump.
Sélectionné en compétition officielle lors de la 77e édition du Festival de Cannes, The Apprentice s'annonce plus comme un film événement que comme une faute de parcours. Réalisé en un temps record, ce film a été un projet compliqué à mettre en place, autant pour l'équipe que pour lui.
D'un côté, le comédien a dû ingérer des centaines d'heures d'archives de Trump pour se glisser dans la peau du personnage, jusqu'à en frôler l'overdose. De l'autre, ce film - considéré comme une folie par le milieu, a essuyé de nombreuses critiques à Hollywood, menaçant longtemps son financement. Et les critiques, Sebastian Stan n'y a pas échappé, notamment... de la part de son entourage.
Dans une interview accordée à David Canfield dans Little Gold Men de Vanity Fair, l'acteur s'est confie sur cette myriade d'avis négatifs et de tentatives de découragement. "Tout le monde me disait plus ou moins : 'Non, tu vas exclure une moitié de la population. Pourquoi avons-nous besoin d'un autre Trump ? Pourquoi devrais-je voir deux heures de cette chose ? Qu'en est-il de ta sécurité ?' a-t-il soufflé au micro du podcast. J'ai reçu des milliards de commentaires comme ceux-là".
Pourtant, malgré les inquiétudes partagées par tout le monde, l'acteur ne s'est pas découragé. Il avait comme un pressentiment et a décidé de s'en remettre au destin : "J'ai pris [toutes ces remarques] en considération. La production ne cessait de se lancer et de s'effondrer. Je me suis dit 'Si ça ne fonctionne pas, ainsi soit-il - c'est que ça ne devait pas arriver et que je n'étais pas destiné à le faire. Mais ça ne va pas arriver parce que j'ai trop peur, ou parce que quelqu'un me dit que je ne peux pas le faire ou parce que je ne lui ressemble pas'".
Tourné dans l'urgence en une vingtaine de jours en plein hiver à Toronto, dont les températures avoisinaient, toujours selon l'acteur, les -5 degré, limitant la lumière naturelle, le film a finalement vu le jour. Et, depuis son passage à Cannes et une campagne de promotion qui prend forme petit à petit, Trump a semble-t-il vu le film. Et autant vous dire qu'il n'est pas ravi. Ce qui est plutôt positif.
The Apprentice retrace les premières années de la vie professionnelle de l'ancien président des USA et de sa relation avec le procureur Roy Cohn. Un projet que Trump a condamné dans un communiqué, stipulant que tout ce qui est raconté dans le film n'est que pure fiction. "Un tas d'ordures", "des mensonges", "de la diffamation" sont autant de termes employés pour qualifier le film d'Abbasi. Un dépôt de plainte serait même en cours.
Pourtant, Sebastian Stan a de quoi avoir le sourire. En plus de sa sélection à Cannes, The Apprentice est aujourd'hui très bien reçu par la critique. Sur Rotten Tomatoes, il est actuellement doté d'une note moyenne de 77% et possède de très bons retours. "C'est une interprétation très agréable des discussions secrètes en coulisses, à l'instar de The Crown, et ça ne se prend pas trop aux sérieux" a écrit le New York Post. De son côté, EW assure : "Le film pointe parfaitement du doigt le rêve américain, révélant dans les détails comment cela peut vite tourner au cauchemar". Enfin, The Wrap y voit même une approche osée pour un biopic : "D'une certaine façon, ça se rapproche d'un film d'horreur réel, avec un Abbasi qui côtoie le conte de Frankenstein, avec ce savant fou qui crée un monstre avant d'en perdre le contrôle". Si avec ça vous n'êtes pas hypé...