Le 7 mars 2024, Prime Video a mis en ligne Ricky Stanicky, la dernière comédie de Peter Farrelly portée par Zac Efron et John Cena. Et si ce film n'est pas le meilleur projet du réalisateur - on fera difficilement mieux que Dumb and Dumber co-réalisé avec son frère Bobby Farrelly, il n'en reste pas moins très cool et divertissant. Et comme le laissait déjà supposer sa bande-annonce, on le doit en grande partie à John Cena. C'est simple, depuis quelques années, le comédien réalise la carrière parfaite, ce que j'espérais voir Dwayne Johnson continuer à embrasser...
Petit retour en arrière. N'étant absolument pas fan de catch, c'est en 2003 que j'ai découvert The Rock dans le film Bienvenue dans la jungle. Certes, là encore, on n'était pas sur du grand niveau de cinéma, mais du haut de mes 13 ans, je le trouvais génial. Drôle, improbable et portée par un duo Seann William Scott (American Pie) et Dwayne Johnson déjanté, cette comédie était tout ce qu'il me fallait. Car oui, à cette époque, Dwayne Johnson était source de nombreux espoirs.
Malgré un physique moins imposant qu'aujourd'hui, il m'avait déjà happé par un charisme fou qu'il mettait parfaitement au service de son jeu. Plus que le mec badass bourrin qu'on utilise pour des scènes d'action, il renvoyait la promesse de nombreuses possibilités à exploiter. Chose qu'il a effectivement mis à profit par la suite.
Heureux de se voir proposer des projets après une première carrière dans le sport, il a longtemps surfé sur une innocence rafraîchissante, lui permettant de faire à la fois preuve d'autodérision et de sincérité à l'écran. Be Cool (2005), Southland Tales (2006), La Montagne ensorcelée (2009), Very Bad Cops (2010), No Pain No Gain (2013)... tout autant de projets qui, même s'ils étaient loin d'être des chefs-d'oeuvre, l'aidaient à dégager un truc jouissif, qui manquait au cinéma alors que les Sylvester Stallone et Arnold Schwarzenegger se faisaient vieillissants.
Attention, je ne dis pas que Dwayne Johnson était le meilleur comédien du monde destiné à rafler 5 Oscars. En revanche, je reste persuadé qu'il possédait les épaules pour s'offrir une carrière à la trajectoire parfaite. Malheureusement, ce n'est pas totalement ce qu'il s'est passé. À mesure que sa cote de popularité a logiquement explosé, il a progressivement changé de stature au point de se faire dévorer par celle-ci. De l'acteur prêt à tout pour s'amuser, peu importe les risques pour son image, il est devenu un control freak sans saveur, un business man avant d'être un comédien. À tel point qu'il apparait désormais comme son propre cliché.
On connait tous ce meme où, avec des images de lui dans la jungle, il est impossible de savoir à quels films elles appartiennent tant ces projets se ressemblent tous. C'est tristement ce qui résume le mieux sa filmographie à ce stade. Aujourd'hui, le box-office, le succès et le buzz passent avant le plaisir et l'épanouissement créatif. Dernière preuve en date ? Son retour à la WWE où il s'est amusé à utiliser un extrait de la chanson You're welcome du film Vaiana. Là où ce film avait été salué par tous et avait permis à la star de dévoiler une autre facette de son talent, il n'a pu s'empêcher de tordre ce succès pour faire grimper sa propre hype dans le monde du catch en détournant complètement le titre... Effectivement, en termes de chiffres ça fonctionne à chaque fois, mais à quel prix ?
Et c'est là qu'entre en jeu John Cena. Également progéniture de la WWE, le comédien profite aujourd'hui de sa nouvelle vie au cinéma... pour s'éclater. Pour devenir ce que Dwayne Johnson aurait pu être : l'acteur badass le plus cool et attachant du cinéma. Pourtant, lui aussi possède une gigantesque image et popularité à préserver grâce à ses exploits sportifs passés. Mais à l'inverse de The Rock, il a opté pour le parti pris de ne rien calculer, de suivre son instinct et ça lui donne pleinement raison.
Ces dernières années, on l'a ainsi vu en père de famille totalement flippé dans Contrôle parental (2018), en pompier complètement dépassé par des gamins avec une scène de couche mythique dans Chaud Devant ! (2019), en anti-héros en total roue libre dans Peacemaker (2023), et aujourd'hui en loser à la ramasse qui se déguise en Britney Spears et reprend des chansons cultes version porno dans Ricky Stanicky (2024). Et bien sûr, il continue d'être badass et méga stylé dans des blockbusters épiques comme The Wall (2017), Bumblebee (2018) ou la saga Fast and Furious (2021-2023).
Peu importe si les rôles sont importants, stupides, ou improbables, il n'avance que pour le plaisir. Et forcément, même quand les films sont bancals, on prend tout de même un shot de kiff parce qu'on croit en lui et en sa sincérité. Il ne triche pas, il donne tout devant la caméra. Et tant pis si ça contraste avec / casse l'image qu'il avait mise des années à se bâtir. C'est notamment grâce à ça qu'on a pu le voir tout nu pour un sketch lors de la cérémonie des Oscars 2024 ou qu'on l'a retrouvé en sirène dans le film Barbie. Et ce, alors même que son agence était contre.
"Pour l'agence, ils fonctionnent en mode : 'Cette entité, cet 'article' gravite autour de cet univers, on doit donc rester sur notre ligne'. Mais je ne suis pas un article. Je suis un être humain et j'agis par le simple fait que chaque opportunité est une opportunité, a-t-il déclaré l'an passé à Howard Stern afin d'expliquer son drôle de caméo au côté de Margot Robbie. D'un point de vue de l'agence, ce rôle de sirène n'était 'pas à ma hauteur'. Et je comprends ce qu'ils veulent dire. Mais je leur ai dit que je voulais le faire, ils ne peuvent que me guider, ce ne sont pas eux qui prennent la décision finale." Il le précisait ensuite : "Leur idée était que les possibles retombées du rôle auraient pu me faire louper de meilleurs projets. Et je comprends. Mais j'ai toujours agi selon la philosophie qui dit : 'un bon travail vous offrira une autre chance'."
Un point de vue que l'on ne peut que saluer et qui apparaît comme très fort dans une telle industrie, et qui explique pourquoi Ricky Stanicky est aussi divertissant. Là encore, cela se sent que John Cena n'avance que pour le bonheur de s'amuser et de nous divertir. Et c'est ce qui apporte une vraie crédibilité aux gags et renforce davantage la puissance de ses répliques. Enfin quelqu'un qui a tout compris et qui nous ramène au meilleur du Schwarzenegger des années 90 !
Et c'est avec un tel mode opératoire que je suis persuadé que la star de 46 ans possède un bel avenir à Hollywood. Au regard des nombreux compliments auxquels il a le droit aujourd'hui de la part de ce métier, où son manque d'ego est aujourd'hui vanté, je ne serais pas surpris de le voir signer pour son propre Tchao Pantin d'ici à cinq ans. Et j'ai hâte de suivre ça.