CINÉ SÉRIE
Je suis allé découvrir en salles LE film d'horreur événement du moment (et je ne verrai plus jamais les chiens de la même façon)
Publié le 19 mai 2024 à 19:15
Par Clément Arbrun | Journaliste société
Journaliste Société et Pop Culture, Clément s'intéresse autant aux punchlines de Virginie Despentes qu'aux perruques de Bilal Hassani et aux blagues de Panayotis Pascot. Il aiguise principalement sa plume en papotant féminismes, genre et fashion, ce qui lui permet de parler d'Harry Styles, des gens pas toujours fréquentables qui emploient le mot "woke" sur Twitter et des dernières prods Netflix.
Un film d'horreur, chez soi, ça se voit, mais en salles, ça se vit. La sortie événement en France de "When Evil Lurks", LE film de genre multi primé à ne pas louper, vient confirmer l'adage. Je suis allé affronter la Bête pour vous, quitte à en ressortir trauma.
La bande-annonce du film When Evil Lurks © Shudder, IFC Films
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Pour aller voir un film d'horreur en salle, il faut aimer souffrir. Une cruelle réalité à laquelle je me confronte à chaque séance en solo ou entre amis face à une histoire de revenants, d'exorcisme, de fantôme. On souffre soit parce que le film est nul, soit parce qu'il est trop bon - immersif, efficace, dévastateur. Le positif, c'est que le tour de grande roue s'effectue toujours à plusieurs, parmi un public traversé de cris de surprise, de mains qui viennent recouvrir les yeux, de rires très, trop nerveux. Des rituels que connaissent bien les habitués !

>> Intrigué par son million d'entrées, je suis allé voir Un p'tit truc en plus d'Artus, je m'attendais au pire mais ça bousculé mes a priori <<

Et qui je l'avoue constituent également mes petites habitudes de spectateur. Et j'adore me replonger dans ce type d'expériences quand le film en question... Promet d'être bon. Voire même, très bon. C'est le cas, à en croire les critiques, les diverses reviews sur YouTube ultra élogieuses et sa tournée prodigieuse des festivals de cinéma, de la toute nouvelle sensation du genre : When Evil Lurks.

Il ne suffisait que de cela d'ailleurs pour me convaincre : ce film argentin (oui oui, argentin) qui relate une bête histoire de possession démoniaque particulièrement virulente se propageant à travers le pays est ressorti triomphant du Festival de Gérardmer, LA ref des événements qui mettent en valeur le cinéma horrifique. Et j'attendais dès lors depuis des mois son arrivée dans les salles françaises, le 15 mai dernier.

Verdict ?

Quand un film d'horreur plus énervé que jamais devient une vraie expérience de communion en salle

When Evil Lurks, c'est donc l'histoire de deux ruraux du fin fond de l'Argentine découvrant du jour au lendemain qu'un de leurs voisins est... Contaminé. Ou plutôt, possédé. Car si un démon l'habite, les conséquences sur la victime ont davantage quelque chose de l'infection zombie : déformations, pus, corps qui fond comme neige au soleil. Ne me remerciez pas pour les détails qui font toujours plaisir à l'heure du déjeuner.

>> J'ai dévoré ce roman gore, parano, provocateur et brillant en un temps record, alors qu'il fait 900 pages ! <<

Immédiatement, notre duo (deux frères) comprend qu'il doit prendre la poudre d'escampette s'il ne veut pas finir, lui aussi, en steak haché sur pattes. Mais où et comment fuir quand l'humanité elle-même semble d'ors et déjà condamnée ? J'ai très vite été happé par ce phénomène du cinéma argentin. Les premières minutes sont déroutantes, dévoilent peu à peu l'intrigue, par petits bouts, et ce qui nous est révélé sur cette "infection" ou possession est délicieusement trouble. On ne sait pas si When Evil Lurks est une histoire de morts-vivants, un potentiel récit d'exorcisme ou un thriller parano se jouant de la frontière entre réalité et fantasme.

>> 25 ans après, j'ai revu au ciné l'un des Star Wars les plus malaimés, et ce fut une expérience mouvementée <<

Il faudra attendre les premiers éclats de gore, généreux et énervés, pour que ce que propose le film se précise. J'ai dès lors naturellement soupiré en même temps que mes voisins de fauteuil en découvrant non sans crainte (pour la suite !) ce que le cinéaste Demián Rugna voulait me (nous) faire subir : un film d'horreur où les victimes sont les plus faibles, autrement dit... Où les enfants et les chiens sont visés en priorité. Oui.

Un voyage bien chaotique qui m'a fait penser à certains classiques indémodables du genre

Visés, sans la moindre hésitation. Et pour mon plus grand malaise. Vecteurs principaux de contamination, ceux qui sont censés "en réchapper" dans les films d'horreur d'ordinaire s'avèrent ici particulièrement vulnérables et menacés. Et c'est impitoyable de ce côté-là. Car Demián Rugna ne va lésiner sur rien : le sanguinolent, l'effet de surprise, la douleur, la cruauté. Dans la salle, on se retrouve dans un état d'attention constant, devinant (hélas) ce qui pourrait (mal) se passer. Et le film dépasse bien souvent nos attentes... Sans vouloir spoiler.

Moi qui ne me suis jamais remis du rôle primordial de Snoop, alias Messi, le toutou star de la palme d'Or Anatomie d'une chute, j'ai aimé la manière dont Demián Rugna met en scène les chiens dans son film. Fans de 50 millions d'amis, passez votre chemin : ici, les chiens sont des dangers permanents et l'on ne sait jamais quand le drame va se concrétiser et rendre le flux des événements plus chaotique qu'il ne l'est déjà. Cela m'a fait penser à un classique du cinéma d'horreur : The Thing, de John Carpenter. Une autre histoire d'entité qui va contaminer progressivement toute une communauté d'hommes.

D'ailleurs, s'il y a bien un imaginaire fort au sein duquel puise When Evil Lurks c'est celui de la "Trilogie de l'Apocalypse" de John Carpenter : trois films qui mettent en scène une certaine idée de la fin du monde, avec tout ce que cela implique de monstres, de présence démoniaque, de propagation inévitable suscitant la paranoïa, de Mal avec un grand M qui vient mettre le monde à genoux. Tout un programme, auquel cette séance m'a joyeusement renvoyé, réactions de stupeur et esclaffements sonores très nerveux de mes voisins à l'appui. Je vous la recommande plutôt deux fois qu'une.

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