Depuis ses débuts fracassants, SCH s'est imposé comme l'une des figures incontournables de la scène rap en France. Débarqué en 2015 tel un ovni au milieu d'un game alors en pleine effervescence en raison de son renouvellement indispensable, celui que l'on surnomme le S a su saisir parfaitement sa chance pour imposer son univers musical et esthétique, et ainsi participer à part entière à la redéfinition d'un genre musical qui commençait gentiment à tourner en rond.
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Mais loin de se contenter de ce statut officieux, SCH a poursuivi sur sa lancée en parvenant à se forger une splendide discographie, qui compte définitivement parmi les plus intéressantes de sa génération - à l'instar d'autres rappeurs comme Damso, Laylow ou encore Hamza. Aujourd'hui, celui que l'on connaît également sous le nom de Julien Schwarzer à l'état civil et comme juré du programme Nouvelle École sur la plateforme Netflix vient de fêter ses 30 ans. L'occasion de jeter à nouveau un oeil sur l'ensemble de l'oeuvre d'un artiste d'ores et déjà iconique.
Sorti bien trop tôt après un succès retentissant, le premier album de SCH est une déception (malgré une introduction épique avec le titre éponyme). Et ce, même si le public est bel et bien au rendez-vous au moment de la sortie, notamment pour les hits Je la connais ou Allo maman. "Anarchie" souffre indéniablement de la comparaison avec "A7" et, pire, semble parfois même singer son prédécesseur, quitte à tomber dans une forme de caricature. Il aura au moins eu le mérite de révéler le rappeur italien Sfera Ebbasta au public français avec Cartine Cartier.
Album coincé entre les sorties respectives des deux tomes "JVLIVS" - pas une mince affaire, ce disque souffle le chaud et le froid. Il touche parfois au sublime avec un SCH au top, tant dans la forme que dans le propos (Interlude), et frôle par moment le fond (Super Silver Haze). Malgré quelques fulgurances et un résultat qui reste bien au-dessus de la moyenne proposée par la concurrence, la plupart des morceaux n'ont pas marqué les esprits.
Bien que le concept reste particulièrement élaboré pour une mixtape, "Autobahn" n'est pas le projet le plus inspiré du S. Même si nombre de titres se révèlent, là aussi, bien meilleurs que 90% du rap français dans son ensemble sorti la même année, le moteur de cette grosse mécanique qu'est "Autobahn" a bien du mal à vrombir. Le rappeur a même dédicacé un morceau à Vivienne Westwood et on ne peut pas vraiment dire que ça lui ait porté chance puisqu'elle est décédée à peine un mois après la parution du titre. Quand ça ne veut pas, ça ne veut pas.
Drôle de destin que celui de "Deo Favente". Boudé à sa sortie par les critiques spécialisés et les rapophiles, l'album regorge pourtant d'audace et de diverses prises de risque, avec du bon et du moins bon, certes. Mais comme le bon vin, l'effort du rappeur d'Aubagne se bonifie avec les années qui passent et il a quasiment réussi l'exploit d'être réhabilité par les auditeurs plusieurs années après sa sortie.
Les mafieux italiens des années 1960 ont laissé place aux grands bandits du sud de la France. Influencé notamment par l'ampleur inattendue du projet 100% marseillais "13 Organisé" quelques mois plus tôt, SCH opère ici un virage à 180 degrés dans sa musicalité. Le discours évolue et se révèle plus contemporain. Si la controversée sensation drill Freeze Corleone (Mannschaft) se greffe parfaitement à cette tracklist dense et presque sans temps mort, son compère JuL - malgré un titre réussi dans son registre - beaucoup moins (Mode Akimbo).
C'est avec cette première proposition que SCH a forgé sa légende et son personnage. Les tubes que sont Champs-Élysées et Fusils déconcertent, sortent de tous les codes connus de l'époque et finissent par s'imposer. Le morceau éponyme devient un incontournable du répertoire du S et des manifestations ("se lever pour 1.200 c'est insultant"). Avec cette oeuvre déroutante à la croisée des chemins entre la violence d'Or Noir de Kaaris et la noirceur de la série italienne Gomorra, le rappeur livre un monument du rap français, tout simplement.
Rarement un album ne se sera révélé aussi conceptuel et minutieux. Un storytelling à couper le souffle avec des interludes dignes d'un long-métrage de Martin Scorsese, une imagerie à couper le souffle et une musique qui laisse autant la part belle à la splendide plume de son auteur qu'à une musicalité teintée de multiples émotions. Rien n'est à jeter. Tout prend une théâtralité saisissante et le moindre détail devient grandiose. Un chef d'oeuvre.