Les recherches pour les masques sur Internet ont grimpé de 496% au cours du premier trimestre 2020. C'est ce qu'affirme Lyst, le moteur de recherche spécial mode. Déjà, avant la pandémie de coronavirus, les masques s'invitaient dans les collections. On peut par exemple citer ceux imaginés par Marc Jacobs et Richard Prince pour Louis Vuitton, ceux de Rick Owens, Alexander Wang, QIAODAN ou encore de la collab Nike x Alyx. Même Virgil Abloh, le créateur de Off-White, avait lancé des masques avec le logo de sa marque, vendus 95 dollars pièce. Et ils se sont retrouvés en rupture de stock (et sont désormais vendu 3 fois plus cher sur les sites de revente). Chez les stars aussi, en dehors des rappeurs, plusieurs artistes n'ont pas hésité à venir masqués sur les red carpet, comme notamment Billie Eilish, Miley Cyrus et Ariana Grande.
Et depuis le Covid-19, les masques et la mode font de nouveau bon ménage, mais pas avec la même signification. Alors que plusieurs marques ont aidé à lutter contre le coronavirus, soit en fabriquant des masques pour les soignants, soit en reversant leurs bénéfices pour les hôpitaux de France, voilà que de plus en plus de designers se lancent dans la création de masques stylés. L'idée ? Aider les gens à trouver des masques, à se protéger du virus, tout en leur apportant un peu de gaieté. Alors le masque, nouvel accessoire de mode à shopper pour le déconfinement du 11 mai 2020 ?
Moins chers que ceux de Off-White, il y a par exemple ceux de Pierre Talamon. Ce tailleur dans le Marais les vend 15 euros pièce. Il a expliqué à l'AFP : "C'est tout à fait logique de l'introduire dans la garde-robe masculine. Cela risque de devenir un accessoire de mode".
En province aussi des magasins ont fabriqué des masques. Isabelle Mathieu, propriétaire de la boutique Tombé du ciel vintage à Marseille (et costumière de cinéma) a ainsi avoué à l'AFP qu'il y a "une vraie demande, on ne s'y attendait pas du tout. On est appelé à en porter au moins pendant un an et demi tant qu'il n'y aura pas de vaccin : il faut apporter un peu de gaieté".
A l'étranger également, plusieurs créateurs s'y sont mis comme l'a indiqué l'Agence France Presse, de Paul Park (créateur de mode sud-coréen qui fait d'habitude des costumes de mariage), à Maria Hibri (créatrice libanaise et co-fondatrice du studio de design Bokja qui crée des masques en soie biologique).
En revanche, du côté des grandes maisons de luxe, c'est silence radio. Eux qui avant le confinement s'étaient prêtés à la tendance des masques semblent ne plus apprécier autant cet "accessoire", sa connotation ayant changé depuis la pandémie. Dior et la styliste Marinne Serre ont ainsi préféré ne pas répondre à l'AFP qui leur demandait si on verrait des masques dans leurs prochaines collections. Arnaud Vaillant, cofondateur de la marque Coperni, a de son côté répondu vaguement : "On préfère ne pas se prononcer pour le moment".
Pour celles et ceux qui se demandent, Coperni est l'une des marques à avoir rapidement proposé aux internautes des tutos pour se faire des masques DIY chez eux. La pénurie de masques en France, "très tôt on a compris que cela allait être un problème" a expliqué Arnaud Vaillant. Du coup ils ont pris les devants en postant des vidéos tutos sur Instagram et les réseaux. Mais de là à en faire un accessoire de mode, ça ne semble pas être pour eux : "Voir des gens masqués c'est un peu inquiétant, on se dit qu'on vit dans un monde particulier".
"Ce serait déplacé et d'une grande vulgarité d'avoir un logo sur un masque et d'en faire un profit" a même assuré Olivier Saillard, un historien de la mode, à l'AFP. "C'est un objet clinique et personne n'a envie de rêver avec cela" a-t-il ajouté, consterné à l'idée que des marques puissent vendre des masques après le déconfinement.
Quant à l'anthropologue Frédéric Keck, il a expliqué dans une tribune publiée dans Le Monde que "le port du masque signifiera que la crise du Covid-19 aura marqué nos corps et nos esprits". "Elle oblige à une perte de l'innocence" a-t-il souligné, "analogue à celle que le sida a imposée dans les rapports amoureux".