Il y a des jeux qu'on a envie d'envoyer valdinguer sur la table. Et pas seulement quand on est mauvais joueur. C'est le cas d'un jeu de cartes, intitulé "Quand Memes", qui suscite une - bien légitime - indignation depuis quelques heures sur les réseaux sociaux. Pourquoi ? Il suffit de lire les intitulés des cartes...
"Quand il change de trou sans faire exprès", "Quand tu te fais sucer, que tu vas jouir mais que volontairement tu ne la préviens pas", "Quand elle te supplie de ne pas finir en elle"... Voilà les messages que proposent les cartes en question, relayées sur Twitter via l'ex candidat EELV aux législatives Noé Petit.
On connaît ce type de jeu entre amis à la "Limite limite", qui mettent en avant un humour noir volontairement provoc, "border" et dégueu. D'ailleurs, "Quand Memes" se définit sur les plateformes des magasins de jouets qui en proposent la vente comme "un jeu d'ambiance transgressif, qui joue sur les associations images-textes qui font la pluie et le beau temps sur Internet".
Mais là, il faut avouer que c'est quand même terriblement gratiné.
Tant et si bien qu'un twitto s'offusque : "Un jeu de société vendu à la FNAC qui promeut le viol. Nos fils vont vraiment s'éduquer grâce à ça, je ne peux que vous féliciter. Blaguer sur le viol et les agressions sexuelles, en faire un sujet de rigolade... Ce n'est pas comme si les femmes subissaient ça, non. Boycottez".
Un appel au boycott qui a engendré foultitude de réactions. Certains sortent la carte de l'humour "subversif" et du "rire de tout", à tout prix. D'autres rappellent tout simplement les bases. Comme cette internaute féministe : "Le fait que ce soit majoritairement des hommes qui brandissent leur droit à "l'humour noir" pour rire des violences sexuelles c'est clairement pas anodin. Vouloir conserver ce droit de rire de viol de femme c'est maintenir sa domination sexiste par l'humour".
"C'est différent quand une victime utilise l'humour pour parler de son propre vécu traumatique. Là, ce genre de "petites blagues" bien sexistes soi disant anodines ne le sont pas ! (Comme les blagues racistes, homophobes) C'est des dominants qui rient de leur actes sans conséquence dans la vie et ils le savent bien", poursuit-elle. La conclusion ? Elle est éloquente : "Nos réalités ne sont pas vos blagues. C'est un crachat à la figure !".
Ce "crachat à la figure", on peut aussi l'appeler "culture du viol". Soit le fait d'euphémiser par différentes manières les viols et agressions sexuelles. Or au fil de ces cartes, on constate bien que l'absence de consentement (constatée comme telle) est censé faire rire, qu'elle concerne la fellation, la pénétration, et (un grand classique pour les adeptes des "blagues" de porcs), le sexe anal. Comme s'il s'agissait d'une vaste blague.
Pourtant, le refus du consentement, ce n'est pas une vanne que l'on balance dans un sketch. Surtout quand de nombreuses enquêtes comme celle de Mémoire Traumatique et Victimologie nous apprend que ce mot, "consentement", est encore trop incompris. Et dès le plus jeune âge. Selon l'association , 20% des 18-24 ans ne comprennent pas que "forcer une personne à avoir un rapport sexuel alors qu'elle refuse", c'est un viol...
L'indignation qui fleurit sur Twitter dit aussi un grand ras le bol : celui des "blagues de viol" justement, hélas trop banalisées malgré leur misogynie, et qui ont peut être plus leur place dans la bouche de Tex ou de Jean-Marie Bigard (et encore, en fin de soirée) que dans un jeu collégial commercialisé dans les grands magasins.
Et on renverra ceux qui crient trop vite à la "bienpensance" et aux "féminazies" à ce tweet impeccable : "C'est quand même un grand privilège de rire de viol, de trouver ça drôle. Quand t'en est victime, c'est beaucoup moins marrant, je t'assure. Ce genre de jeu banalise le viol. La preuve : tu trouves ça normal d'en rire".