20 ans avant The Mother, J-Lo était déjà au coeur d'un thriller féministe très très énervé, et tu dois vraiment le revoir sur Netflix

The Mother vient de débarquer sur Netflix et l'histoire de ce thriller est limpide : Jennifer Lopez incarne une tueuse à gages qui doit protéger sa fille contre des malotrus. Oui oui, J-Lo en personne. Malgré des critiques pas toujours affolantes, le film cartonne sur la plateforme de stream. Mais savais-tu que sur cette même plateforme, tu pouvais retrouver une autre thriller, avec J-Lo toujours, encore plus physique et radical ?

Le film en question, c'est Plus jamais. Il bénéficie d'une véritable aura culte outre-Atlantique, ne serait-ce que pour son affiche : J-Lo en tenue de combat façon MMA, prête à en découdre. Et ce thriller psychologique pas si connu chez nous devrait vachement t'intéresser. Car, sorti il y a déjà vingt ans, il annonçait beaucoup, mais alors beaucoup de luttes et de réflexions hyper actuelles, à tel point que c'en est troublant.

On te résume la chose : J-Lo incarne une mère de famille prête à tout pour sa fille (déjà, oui), et qui va fuir avec elle un mari violent devenu au fil des jours une véritable menace pour sa vie et celle de son enfant. Plus jamais, c'est un film très efficace qui risque bien de te captiver par son tempo haletant. Mais surtout, c'est un manifeste féministe et assumé avec une actrice complètement impliquée... Et engagée.

A le découvrir 20 ans après sa sortie en salles, Plus jamais propage un doux effet de nostalgie "cheesy" (décalée, ringarde), notamment par ses effets de mise en scène un peu clippesques qui sentent bon les années 2000. Et pourtant, on s'étonne de la pertinence de ce film qui nous relate le combat d'une femme pour sa survie.

>> Nouveautés Netflix : le grand retour de la meilleure saga de tous les temps, JLo en tueuse et les futures stars du rap français <<

Survivre face aux manipulations émotionnelles d'un époux qui la malmène, face aux violences physiques, à l'ostracisation qu'elles provoquent, survivre face à la difficulté d'assumer un statut de "victime" et de "femme battue" qui semble honteux dans cette société... Plus jamais parle des violences conjugales comme le font depuis des années les militantes féministes, des livres, des articles dédiés à ce vaste sujet. Mais pas que.

De sa première tentative de dépôt de plainte (où elle s'inquiète de voir son tortionnaire sortir aussi sec) à son ultime recours chez un juge (qui lui fait notamment comprendre que la garde de son enfant ne lui est pas assurée), l'héroïne constate l'impuissance du système à protéger les femmes. Pas simplement face aux violences, non : face au risque de féminicide. C'est-à-dire quand une femme est assassinée car elle est une femme.

Une réalité qui a fatalement concerné 122 Françaises en 2021, tuées par leur partenaire ou ex-partenaire, dixit ce rapport relayé par le gouvernement. Depuis le début 2023, on dénombre déjà près de quarante victimes de féminicides.

>> Ce film d'horreur ultra flippant enfin dispo sur Netflix est bien plus important et politique qu'on ne pourrait le croire, et c'est même le premier post-MeToo <<

Et l'impuissance du système (judiciaire notamment) et des autorités face à ce constat, ce n'est vraiment pas que du cinéma, loin de là. On aimerait beaucoup, mais non. En 16 ans, plus de 2000 femmes ont été tuées par leur conjoint ou ex-conjoint, révèle l'enquête Nos absentes de la journaliste Laurène Daycard.

Récemment, la cinéaste et militante féministe Andréa Bescond clashait Marlène Schiappa sur le plateau de France 5 à ce sujet : "Marlène Schiappa n'a pas supporté que je pointe l'incompétence du gouvernement concernant la gestion des violences en France. 94000 plaintes : moins de 1000 condamnations. 80% des plaintes classées sans suite...". Aux Etats-Unis, chaque mois, 70 femmes en moyenne sont tuées par balle par leur partenaire : on parle carrément d'une "épidémie silencieuse de féminicides".

>> "Va pleurer !" : Marlène Schiappa violemment attaquée, elle menace de quitter le plateau de C ce soir, "je ne vais pas rester sur ce plateau" <<

Plus qu'un récit de relation toxique, c'est surtout ça le vrai sujet de Plus jamais : une mère de famille solo qui s'acharne à lutter dans un monde d'hommes qui tuent les femmes. Et comment ? En adoptant in extremis une méthode, justement, extrême : l'autodéfense. Comme le suggère l'affiche, J-Lo finit par se la jouer Rambo et prendre au piège son ex chez lui, après s'être initiée le temps d'un stage express aux sports de combat.

C'est ce final très énervé qui a rendu le film culte - même si ce n'était pas le premier où la popstar lattait des fesses de misogynes, loin s'en faut.

Il y a vingt ans, ce round vénére semblait improbable, tendance Rocky Balboa qui rencontre Maman j'ai raté l'avion (car J-Lo piège aussi la sublime demeure de son mec). Mais aujourd'hui, il semble très réaliste en vérité. Et même glaçant. Depuis que le fléau des violences domestiques, et celui des féminicides, est davantage médiatisé - on va dire depuis 2017, lorsque la révolution #MeToo a tout remis sur le devant de la scène en bloc - on évoque de plus en plus les stages d'autodéfense pour femmes et toute la riposte féministe qu'ils impliquent.

>> L'Espagne aussi fait son #MeToo de la téléréalité : un candidat condamné pour agression sexuelle >>

Des assoces comme Impact par exemple proposent des "stages d'autodéfense féministe" d'une durée de deux jours afin d'inculquer aux femmes entre deux échanges des techniques physiques "simples et efficaces" pour "s'entraîner à réagir" et "apprendre à poser ses limites au quotidien". L'assoce Faire Face déploie elle aussi des ateliers et des stages pour "éveiller les capacités d'action" de celles qui subissent des "violences de genre".

Tous ces programmes-là se sont d'autant plus développés avec la mise en avant beaucoup plus ample ces dernières années des témoignages de victimes, de films, de séries sur ces "violences de genre" justement : quand des mecs tiennent à asseoir jusqu'au bout leur domination. Dans Plus Jamais d'ailleurs, cette domination masculine est relationnelle, physique, mais elle est sociale aussi : le mari profite de sa supériorité économique pour écraser sa femme, la garder sous emprise. Une situation que bien trop connaissent "dans la vraie vie".

20 ans avant que tous ces sujets ne reviennent d'autant plus sur le tapis en France, un thriller pop avec une star hyper mainstream émettait donc notamment l'hypothèse d'avoir recours à l'autodéfense féministe pour combattre la misogynie et l'impunité des agresseurs. Plutôt culotté non ?

En tout cas, ce qui reste l'un des films les plus badass et engagés de toute la carrière ciné de J-Lo fait encore les beaux jours de Netflix aujourd'hui, et revient souvent dans les propals de l'algorithme pour qui aime les thrillers et les histoires de femmes fortes. On te reco de le rattraper si ce n'est déjà fait.