Récompenser l'horreur, oui, mais l'horreur à la française ! C'est ce qu'a souhaité faire Greta Gerwig, grand nom du ciné indé US, réalisatrice du mégasuccès planétaire Barbie, et présidente du dernier Festival de Cannes, en décernant le Prix du Meilleur Scénario à The Substance, nouvelle déflagration du cinéma gore et cracra.
The Substance, c'est le second long-métrage de la cinéaste frenchie Coralie Fargeat, à qui l'on doit le sympa et énervé Revenge, relecture d'un sous-genre du cinéma d'exploitation extrêmement douteux (le rape and revenge, relatant généralement la vengeance sanguinolente d'une victime d'agression, ou de ses proches)... A la sauce féministe. Moove audacieux que l'on retrouve dans ce deuxième film plus décomplexé. Car Coralie Fargeat, se sont enthousiasmés les critiques à Cannes, s'est plu à délivrer une satire du monde du cinéma en la noyant de sang, avec Demi Moore et Margaret Qualley en haut de l'affiche !
Plus précisément, The Substance nous colle aux basques d'une actrice Oscarisée devenue animatrice has been d'émissions d'aérobic (tout un programme), et qui cherche à acquérir la jeunesse éternelle par le biais de la "substance" du titre... Laquelle ne sera pas sans incidences. Avant de repartir de cette édition cannoise avec le prix du Scénario, ce film d'horreur a tellement affolé les journalistes qu'on lui prédisait la Palme d'Or !
Mais comment expliquer ce buzz ?
Quand The Substance a été projeté sur la Croisette, on a pu lire sur Twitter/X une blinde de compliments vrillant à l'euphorie. "Vous pensiez avoir tout vu ? Coralie Fargeat vous montre que son univers ne connaît aucune limite. The Substance est le punk rock du cinéma", s'est réjoui le journaliste Thomas Desroches, précisant : "Mon cerveau sautait en l'air. J'ai rarement vu un truc pareil de ma vie. Et Demi Moore est immense".
Florilège de bouquets de fleurs lancés aux pieds de cette oeuvre que l'on dit aussi folle que drôle : "J'ai adoré "The Substance", mix jouissif et complètement zinzin de "Vertigo" et "Carrie" qui commence comme un thriller psychologique pour se terminer en comédie d'horreur" (Jérôme Lachasse, BFM TV), "Avec son métrage d'horreur jouissivement gore et maximaliste, la réalisatrice française filme le corps féminin jusqu'à l'écoeurement" (Anaïs Bordages, Slate.fr), "Coralie Fargeat s'éclate avec "The Substance", une comédie choc et gore sur le vieillissement du corps féminin" (Sandra Onana, Libération). Qui dit mieux ?
Chose rare dans le cinéma frenchie, cette comédie noire que les spécialistes comparent à La mort vous va si bien (satire mordante et horrifique sur les diktats de beauté réunissant Meryl Streep, Bruce Willis et Goldie Hawn) et Sam Raimi (le papa de la franchise Evil Dead), revendique sa parenté avec un sous-genre très très spécifique : le body horror. Autrement dit, des films qui basent leur postulat sur la dégénérescence physique, le corps qui se dégrade, les mutations les plus crades. Comme le tout récent et réjouissant Sick of Myself.
De l'horreur organique et charnelle dont le pape incontesté est Canadien : il s'appelle David Cronenberg, et on lui doit des claques comme Vidéodrome, La mouche, ExistenZ... En France, des réalisatrices comme Marina de Van (le traumatisant Dans ma peau, sur une femme qui s'auto-dévore) et Julia Ducournau (lauréate de la Palme d'or pour Titane) ont à l'unisson su magnifier le body horror.
On attend donc (vraiment) beaucoup de Coralie Fargeat, qui devrait faire des merveilles de ce genre ultra visuel, dérangeant et viscéral. Hâte !