Christopher Nolan est-il aussi exigeant lorsqu'il voit des films que lorsqu'il en fait ? Clairement. Car si l'année 2024 sera certainement celle du sacre aux Oscars pour le cinéaste britannique - on croit très fort au couronnement de son Oppenheimer, nominé 13 fois - force est de constater que le metteur en scène est aussi un cinéphile. Et qu'il n'hésite pas à filer des petits coups de pouce à ses collègues émérites. Voire même à ses consoeurs.
Effectivement, une longue interview du TIME nous apprend les deux derniers gros coups de coeur ciné de Christopher Nolan : Past Lives et Aftersun. Deux films indés encensés par la critique, imaginés par deux femmes cinéastes, dont c'est, respectivement, le tout premier long métrage. A savoir, les réalisatrices Celine Song et Charlotte Wells. Deux oeuvres poignantes, chacune à leur manière.
Et deux films majeurs pour Nolan, qui explique pourquoi...
Inciter son public à rattraper deux premiers films de cinéastes qui méritent une plus grande reconnaissance publique ? Ce n'est pas un geste anodin quand l'on est un artiste aussi reconnu que Christopher Nolan. Et le réalisateur ne se limite pas au name droping. Il détaille : "Aftersun est vraiment un beau film et Past Lives est subtil d'une belle manière". Deux oeuvres effectivement très délicates, aux antipodes des blockbusters.
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Etonnants choix que ceux-là ? Pas forcément. Quiconque l'a vu déambuler dans un vidéoclub sait que le réalisateur perfectionniste de The Dark Knight, Interstellar et Memento apprécie autant le cinéma de Stanley Kubrick ou le Nouvel Hollywood des années 60-70 que la Nouvelle Vague. Surtout, il y a dans ces deux films acclamés en festivals une émotion qui a su certainement le toucher en plein coeur.
Aftersun relate les vacances entre une gamine et son père - incarné par Paul Mescal. Père aux zones d'ombre indéniables et que l'on découvrira peu à peu à travers le regard très sensible de sa fille. Ce drame familial est mis en scène comme un film de vacances, traversé de bribes de souvenirs disparates, de silences étendus, de non-dits, de longs plans qui semblent tout droit émerger de la mémoire même des personnages. Puissante expérience.
Past Lives se joue également de notre rapport au temps et à la durée : cette histoire se déploie sur plusieurs décennies. L'on y suit deux amis d'enfance qui se retrouvent après une longue absence. 24 ans de leur vie commune nous sont partagés, et leur relation toute platonique est mise en images avec une inouïe délicatesse. On est vraiment, mais alors vraiment loin des clichés des rom-coms américaines tradis. A l'instar d'un Lost in translation, Past Lives est une alternative intelligente aux histoires d'amour conventionnelles.
Le point de vue hyper subtil de la cinéaste sud-coréenne Celine Song et l'alchimie incroyable des deux comédiens vient bousculer les lignes de la love story. Tout comme Aftersun (dispo sur Canal+) aime à nous emmener lentement mais sûrement là où on ne l'attend pas forcément, sans craindre de perdre son public en route. Deux merveilles à découvrir, vite !