A la manière des Simpson qui ont à peu près prédit tout ce qui nous arrive depuis des décennies, Thierry Ardisson, lui, peut se vanter d'avoir inventé beaucoup de concepts, au grand dam de son ennemi Cyril Hanouna. L'un des derniers se nommait Hôtel du temps, une émission dans laquelle il utilisait l'intelligence artificielle pour redonner vie à des célébrités décédées et leur faire raconter leur vie. Une idée peut-être trop novatrice qui n'a pas franchement séduit le public et qui a pris fin après seulement trois numéros.
Si entendre les morts parler n'a pas chauffé les téléspectateurs français, ça semble en revanche beaucoup plaire aux Chinois. Sur leur téléphone ou même dans les cimetières, certains font ainsi face à un proche disparu qui leur parle comme s'il était encore de ce monde. Il ne s'agit pas de simples enregistrements mais bien de phrases encore jamais prononcées et créées par l'IA via une sorte de sosie virtuel.
BFMTV évoque plusieurs sociétés chinoises spécialisées dans ce domaine, comme Silicon Intelligence ou Super Brain. Le fondateur de cette dernière préfère parler de "service de guérison émotionnelle" plutôt que de business.
Le concept n'est pourtant pas si récent puisque le journal suisse Le Temps consacrait déjà une vidéo au sujet dès 2021. On était à l'époque loin de la Chine puisque l'article mettait en avant la technologie Deep Nostalgia développée par MyHeritage, une entreprise israélienne. Celle-ci a eu son moment de gloire lorsque Kanye West, alors encore en couple avec Kim Kardashian, avait offert à sa douce un hologramme hyper réaliste et parlant de son père, Robert Kardashian, mort près de 20 ans plus tôt.
Mais alors comment ça marche ? L'IA utilise tout ce que les vivants ont encore de leurs proches décédés. Vidéos, photos, enregistrements audio, tout est bon pour enrichir le logiciel qui crée ensuite un avatar numérique "cloné". Pour le moment, le service peut nécessiter autour d'un mois pour un résultat complet. Côté prix, BFMTV évoque "quelques milliers d'euros". C'est vague, mais ça situe que ce service ne risque pas pour le moment d'envahir les cimetières du monde entier. Heureusement ?
Au-delà de l'aspect glauque, l'outil peut aussi développer des troubles craint le spécialiste en droit et éthique de l'innovation Johan Rochel, cité par Le Temps : "On aura peut-être des nouvelles formes de maladies autour du deuil, un usage quasiment maladif de ces outils technologiques pour ne pas laisser la personne s'en aller, des nouvelles formes de dépression...". Il prévient d'ailleurs que le marché est énorme "parce qu'on touche à un besoin fondamental de l'être humain, qui est de refuser, ou en tout cas d'avoir beaucoup de difficultés à accepter, la mort".
Il craint donc une dérive. A juste titre puisque les services autour de la "réanimation des morts" se multiplient sur internet. Des sociétés monnaient par exemple le fait de rester actif sur les réseaux sociaux après sa mort en préparant des publications à publier après votre décès.
Du côté des clients aussi, les dérives sont à craindre. Certains clients de l'IA chinoise mentionnée au début de l'article demandent ainsi de leur fabriquer des "relations" avec un ex qui ne veut plus leur adresser la parole. Et quand on sait que tout ce qui existe à son équivalent version porno, on vous laisse imaginer ce qui pourrait en découler. On espère être mort avant de le découvrir.