Propos recueillis par Thibaud Visse. Ne pas mentionner sans citer PureBreak.com
Comment as-tu enregistré cet album ? Je sais que tu t'es installé avec tes musiciens en Provence quelques semaines... C'était un besoin de partir de Paris ?
J'avais très envie d'aller au Studio de la Fabrique, ça c'est fait tout bêtement ! Pendant la composition des chansons je suis tombé sur un teaser de l'album de Nick Cave qui avait enregistré là-bas. Au-delà de la classe du mec et des musiciens j'ai vu ce lieu et je me suis dit : " c'est fou j'ai jamais entendu parler de ce studio ". Je vois Saint Rémy de Provence, je me dis c'est proche de chez moi... Je savais qu'on partirai ensemble avec mes potes. Je voulais vraiment qu'on passe trois semaines ensemble sans rentrer chez nous le soir. Ce n'était pas tant pour bosser tout le temps, mais plutôt pour vivre ensemble ce moment-là car des albums on en enregistre pas tous les ans. Je voulais partager non seulement ce privilège avec mes potes mais j'avais envie aussi qu'on soit suffisamment vidés du lien du quotidien avec la ville dans laquelle on vit. C'est d'ailleurs souvent la meilleure façon pour garder de soi ce qu'il y a de plus pur pour construire sa musique.
Ce 3ème album LØVE est le fruit d'une rupture. C'est plus facile d'écrire et de trouver l'inspiration quand on est triste ?
Pas du tout. Les chansons parlent d'elles-mêmes. Effectivement, elles parlent d'un lien amoureux, d'un lien qui s'éteint, d'un lien qui garde des souvenirs, d'un lien qui garde les plus belles choses. Tout ce que j'ai sorti de ma bouche, de mes mains, mots et musique a toujours été des chansons d'amour. C'est sans doute aussi les mots dans lesquels je vais piocher, je trouve qu'il y a quelque chose de très beau dans une chanson d'amour. Quand on les écrit, il y a toujours un moment où on rêve d'écrire la plus belle chanson d'amour possible. J'ai quand même ce sentiment que chez pas mal d'artistes on a tous une chanson d'un artiste qui donne l'impression qu'elle a été écrite pour nous, pour une histoire qu'on a vécu ou pour quelqu'un qu'on connaissait. Ça c'est quelque chose qui me touche beaucoup. Ce disque-là (LØVE), est le reflet du moment où les mots sont venus pour décrire la plus belle chose que j'avais vécu dans ma vie et qui venait de s'éteindre. J'avais envie d'en faire des chansons. J'en fais des petits bouts d'arts qu'on peut partager. J'ai le sentiment aujourd'hui - je pense à Paris-Seychelles car j'entends le public la chanter en concert - que pour chaque personne dans la salle c'est leur histoire. Du coup il n'y a rien d'impudique car ça ne m'appartient pas. J'ai juste fait des chansons d'amour qui parlent d'elles-mêmes. Je crois que j'aime bien écrire sur ce ressenti-là, sans doute parce que c'est ce qu'il y a de plus important au monde dans l'époque dans laquelle on vit. Penser à l'amour, penser au partage, je parle d'une manière générale... Entre un homme et une femme, un homme et un homme ou une femme et une femme, je parle juste de la possibilité d'aimer l'autre, c'est souvent des choses qui me motivent pour aller vers le bien et un changement qui pour moi est important. Dans la musique, c'est ce qui m'a fait du bien.
Après presque un an d'exploitation, LØVE s'est vendu à plus de 200 000 exemplaires. Comment réagis-tu face à ce succès et cet engouement du public ?
Je mentirai si je ne disais pas que ça soulageait quelque chose. C'est vrai que de voir sur la tournée les salles complètes, de voir l'accueil que j'ai eu pour Paris-Seychelles, pour On Attendra l'Hiver et puis en ce moment avec Chou Wasabi qui est une chanson qui vient de sortir, de voir les retours que je peux avoir de mes interviews, de ma façon de m'exprimer... C'est bien le signe que j'ai pris toute cette aventure sans savoir au départ ce qui allait se passer. On parlait du studio auparavant. Quand je suis parti là-bas je n'avais aucune idée de ce qui pouvait se passer et tant mieux parce que ce n'est pas uniquement personnel. Cet accueil-là fait du bien et donne aussi l'envie en permanence de donner le meilleur de soi et de continuer à travailler les spectacles, la mise en scène, nos performances. C'est ce qu'on essaie de faire.
Il y a une éternelle remise en question alors...
On se remet très souvent en question pour essayer d'améliorer les choses oui. Il n'y a qu'à nous suivre dans le tour bus entre deux dates pour voir qu'on re-regarde les choses. On essaie de les améliorer et on essaie aussi de s'enlever cette pression. On est heureux de vivre ce qu'on vit. Les choses viennent d'elles-mêmes et très simplement. On essaie de savourer tout ça car ce sont des moments rares. J'ai la chance d'avoir une tournée complète et un disque qui fonctionne bien. Je remercie aussi d'une façon tous les gens qui travaillent pour moi. Je pense aux personnes de la maison de disques qui sont depuis la crise du marché du disque des jeunes gens qui ont beaucoup de motivation, beaucoup d'envie et une véritable honnêteté par rapport à l'artistique et je suis heureux de voir que notre travail ensemble amène quelque chose de positif. Pareil pour mon tourneur avec qui on monte des concerts... On a vu qu'un jour on pourrait en monter plus, qu'on pourrait doubler des dates. Depuis le premier album je travaille avec les mêmes personnes. Je suis content pour eux aussi. On est au milieu de l'histoire, j'espère qu'on ira au bout de ce disque d'une jolie façon en tous les cas.
Sur l'album tu as travaillé avec Micky Green & Brigitte, maintenant avec qui aimerais-tu travailler ? Il me semble que tu travailles sur des titres inédits...
Je travaille sur quelques surprises. Si je pouvais faire un duo avec quelqu'un ça serait Christine & The Queens. Il y a très peu d'artiste de ma génération – même si elle est un peu plus jeune que moi – avec qui j'ai des affinités musicales. J'écoute peu de musique globalement. Dans la jeune génération, je pense à Feu Chatterton dont j'aime énormément le travail... Ce groupe et Christine & The Queens sont des artistes qui soignent les textes et la musique qui sont les deux versants pour un chanteur. Dans l'esthétique de leur travail il y a une poésie qui est artistique d'une façon large, c'est-à-dire qu'elle n'est pas que musical. J'adore ça ! Je trouve que c'est très important quand on fait un album d'agrandir le regard du public qui nous écoute. La plupart de mes textes sont inspirés de choses qui viennent de moi. Dans mon spectacle il y a des choses qui viennent du théâtre, de la danse... Je trouve que Christine & The Queens est une artiste qui a cette ouverture-là. Elle est artiste car elle fait de l'Art et j'aime le courage de cette dimension-là. C'est important d'essayer de voir les choses en plus grand, ne serait-ce que pour le public qui nous écoute.
Tu es actuellement en tournée avec le LØVE TOUR qui cartonne (Olympia, Folies Bergères...). On voit que sur scène tu t'éclates, est-ce que c'est la partie de ton métier que tu préfères ?
Oui, de loin ! On a fait une première partie de la tournée de janvier à mi-août. J'étais content d'avoir quelques semaines de repos après mais là ça commence à me manquer. Je me suis un peu reposé mais je suis très heureux de repartir sur les routes. Sur scène je me sens utile, je me sens heureux, je me sens bien, je me sens dans un univers qui est le mien mais en même temps que je partage. J'ai l'impression également de continuer à faire vivre mes chansons d'une autre façon que sur le disque. Sur scène je les agrandis, je les travaille, je leur offre une autre dimension. Je fais tout ça aussi pour le partage. A la fin du spectacle j'espère recevoir cette dose d'amour dont j'ai besoin et m'endormir et l'espérer le lendemain matin quand je me réveille dans une autre ville... Tout ça fait que ce que je vis en tournée est ce qui me nourrit et ce qui me fait le plus de bien, c'est certain.
Cette tournée a été captée pour une sortie DVD/CD Live, ton premier. C'était important de garder une trace de ce concert ?
C'est la première fois qu'on capte un spectacle. Je mets en scène mes spectacles, je travaille beaucoup sur la lumière, sur mes déplacements sur scène, sur les décors... A chaque fois je me dis que ça serait encore mieux à la tournée d'après donc je repousse la captation d'un live. Avec cet album j'avais également envie de capter l'histoire d'amitié qu'on a avec les gars et ce lien qui nous unit. J'avais vraiment envie qu'on fixe ça. Je suis content d'avoir capté un moment d'une tournée importante et d'une histoire d'amitié très importante avec ces gars-là et ce disque-là.
Je dois avouer égoïstement que certes, je suis très heureux de pouvoir le partager avec le public qui a envie de voir le spectacle mais je dois bien avouer aussi que c'est pour nous. C'est con à dire mais la plupart de mes gars ont des enfants et sont des papas très heureux et je sais que ce sont des choses qui sont importantes dans une carrière. Ce sont des choses qui resteront et dans quelques années on se dire : " tu te souviens de ces dates-là, de ce spectacle... ". Je suis convaincu de ça.
Ca sort bientôt d'ailleurs ?
Je travaille sur le montage actuellement que je viens tout juste de terminer. J'aimerais vraiment soigner l'objet, c'est comme pour mes disques. J'ai pas envie de me presser pour que ce soit là dans un mois alors que je n'ai même pas encore travaillé sur la pochette. Je veux travailler sur de belles choses donc je pense que je vais attendre encore un petit peu avant de le sortir. Ce sera dans quelques mois, plutôt début 2015....
Rendez-vous jeudi 8 octobre sur PureBreak pour découvrir la seconde et dernière partie de l'interview de Julien Doré dans laquelle il nous parlera de cinéma, de télévision et nous livrera ses derniers coups de coeur. Soyez au rendez-vous !