On le connaît pour sa manie - magnifique pour certains, gonflante pour d'autres - de se mettre en permanence en spectacle, quitte à plonger tête la première dans le cabotinage, ses récitations par-coeur des fables de La Fontaine entre deux mille autres bouquins évoqués, sa manière de "faire le show" jusqu'à l'épuisement, des plateaux télé aux planches.
Oui, Fabrice Luchini est un expert dans l'art du surjeu, du genre à friser la crise cardiaque s'il ne décompose pas minutieusement un mot, syllabe après syllabe. Et pourtant... L'acteur survolté est aussi capable de sobriété. Oui oui. Mieux encore, il n'est jamais aussi bon que lorsqu'il fait dans l'épure, l'intériorité, le calme total. Ce qui est aussi rare qu'une licorne.
Et c'est justement tout cela que met en avant La petite, le nouveau film de Guillaume Nicloux, à découvrir en salles dès à présent. L'oeuvre d'un "autre Luchini". Et qui met en scène un sujet qui divise beaucoup...
La petite nous raconte l'histoire d'un grand-père (Luchini) dévasté par la mort de son fils. Mais que devient donc l'enfant de ce dernier, conçu via GPA ? Notre protagoniste s'en inquiète et décide de retrouver la jeune femme, en Belgique, qui devait accoucher du bébé en question. C'est un combat intime qui commence, animé par une conviction très personnelle.
La gestation pour autrui, ce n'est pas une thématique facile. "Il faudrait, à l'avenir, légaliser la GPA", a déclaré en août dernier le ministre chargé des transports Clément Beaune dans les pages de l'Obs. Une vraie prise de position : l'homme politique se dit favorable à la légalisation de la gestation pour autrui, explique avoir "changé d'avis".
Deux ans plus tôt, le vote de la loi Bioéthique avait à l'inverse abouti à un refus gouvernemental ferme de cette législation... Du côté des voix politiques et citoyennes, les "pour" militent en faveur des droits à la parentalité des personnes LGBTQ, là où le camp des "contre" dénonce une exploitation du corps des femmes. Le débat fait encore rage.
Le cinéaste Guillaume Nicloux ne s'oppose pas à la chose, sans pour autant déployer un plaidoyer. Il préfère mettre à l'honneur un Fabrice Luchini désarmant de justesse en sexagénaire persuadé du bien fondé de son voyage : convaincre une inconnue d'accoucher de son petit fils, ou de sa petite fille. A l'écran, l'acteur n'a jamais autant assumé son âge. Barbe grise, essoufflements, fatigue physique exprimée ouvertement...
Il est très rare de voir une star à ce point familière se mettre en scène ainsi. Une performance sans fioritures donc, ni agitations, grands gestes ou poussées de voix nasillardes. Si vous n'aimez pas Luchini, ce film risque bien de vous faire changer d'avis. Le comédien, qui n'avait jamais été aussi sobre depuis Alice et le maire (avec Anaïs Demoustier), a même reçu les applaudissements de la presse.
Florilège, du Figaro à Première : "Fabrice Luchini n'a pas fini de surprendre", "Un rôle majeur tout en retenue", "L'un de ses rôles les plus marquants", "D'ordinaire hyperactif et survolté, Fabrice Luchini nous apparaît ici sous un nouveau jour. Posé, fragile, vulnérable, il nous émeut aux larmes", "un Fabrice Luchini comme on l'a rarement vu".
Alors, qu'attendez-vous ?