"Elle c'est Barbie, elle peut tout faire. Lui, c'est juste Ken". En France, l'accroche des affiches de Barbie, le film événement de ce mois de juillet, a fait glosé : beaucoup y ont vu un jeu de mots avec le sens familier bien connu du mot "ken" dans notre contrée. Surtout quand il est associé à l'image d'un Ryan Gosling torse nu.
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Mais rassurez-vous, c'est loin d'être la chose la plus drôle dans le film de Greta Gerwig - encore heureux. Car en transposant à l'écran la poupée la plus connue du monde sous les traits de Margot Robbie, la réalisatrice américaine nous a concocté une vraie comédie. Satire - blindée de punchlines féministes - mais aussi comédie musicale, parodie, film burlesque, ce projet improbable à savourer en salles depuis le 19 juillet superpose les couches d'humour avec irrévérence.
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Du détournement des classiques du cinéma (2001 l'odyssée de l'espace de Stanley Kubrick dès la scène d'intro, mais aussi Matrix, jusque dans sa portée philosophique, oui oui !) aux gags absurdes, en passant par la frénésie des cartoon, le couple de scénaristes Greta Gerwig/Noah Baumbach a tout osé. Leur meilleur exploit ? Avoir compris le potentiel d'un grand comique qu'on ignore un peu trop : Ryan Gosling, justement.
Dans Barbie, Ryan Gosling est Ken. Un bellâtre blond au potentiel intellectuel limité (doux euphémisme) qui ne pense qu'à se trémousser sur la plage (alors qu'il ne sait pas nager) en mode Pamela Anderson dans Alerte à Malibu. Muscles en avant, vêtements très légers et sourire bright, la star de Drive nous offre à travers cette performance un détournement au masculin des bimbos, ces femmes raillées par les hommes.
Dans le monde de Barbie, les stéréotypes s'inversent, les femmes ont le pouvoir, et Ken, comme ses autres amis (qui s'appellent tous Ken), apparaît dès lors comme une gentille potiche aux postures niaises et aux réflexions étroites. Un détournement évident des clichés sexistes qui te rappellera peut être le personnage de Chris Hemsworth dans le reboot féminisé de Sos Fantômes - mais en mieux écrit.
Et si Barbie était le seul film à avoir vraiment compris le génie comique de l'acteur ? Dans ce rôle, il fait preuve d'une autodérision massive, s'amusant volontiers de son propre jeu (longtemps raillé pour ses peu nombreuses expressions faciales) et de son physique avantageux, se permettant de cabotiner à l'excès, d'accumuler les garde robes improbables, d'exprimer ses émotions comme le ferait un personnage de dessin animé.
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Loin de la sobriété de La La Land, Ryan est en totale roue libre, et ça fait du bien. Hormis dans The Nice Guys, où il partage l'affiche avec Russell Crowe, rares sont les films à avoir aussi bien mis en avant son côté... Ridicule à l'excès. Mais s'il est ridicule, ou si Ken l'est, alors le culte de la virilité (biscotos, bières au frigo, concours de bites, mépris des émotions, guerre, on en passe), les clichés associés aux mecs et que ceux ci intériorisent quitte à se détruire, les rivalités masculines, les stéréotypes de genre, le sont encore plus.
C'est ça que nous raconte ouvertement le film Barbie, qui trouve en Ryan Gosling un porte parole aussi incongru que savoureux. Derrière cette performance ultra régressive, on devine tout un discours politique qui éclatera le temps d'un grand final. Comme quoi, on peut bousculer son image, quitte à mettre sa dignité de côté, pour servir un vrai message. Et ça, c'est certainement le point commun des grands de la comédie.