C'est un terme qu'on entend absolument partout. Des cours d'école aux stades de foot en passant par certains plateaux télé. On ne peut pas faire insulte plus banalisée. Ce mot, c'est "enc*lé".
Parfois déclinée en sa subtile variation, "allez vous faire enc****", cette expression commune, Daphné Bürki en a ras la casquette. Et elle l'a fait savoir sur le plateau de Quelle époque, le talk show de Léa Salamé. Tout part d'une blague de l'humoriste Paul de Saint-Sernin (bien connu des spectateurs de Téléfoot), plaisantant : "Je me dis qu'une pointe de vulgarité, ça rend une phrase un peu banale très marrante. Qu'est-ce que t'en penses, enc*lé ?".
Mais pas de quoi faire "marrer" la journaliste, qui a rétorqué du tac au tac : "C'est une insulte homophobe". Une assertion qui a joliment retourné le plateau. Et suscité la joie de la communauté LGBTQ...
"Il y a énormément d'homophobie en France, de l'homophobie qui tue, au collège les homosexuels sont sept à huit fois plus harcelés. Oui, la France est homophobe, alors quand j'entends le mot enc*lé, ça me met mal à l'aise", a développé Daphné Bürki face à un Thierry Ardisson fidèle à lui-même l'accusant de "politiquement correct", et aux protestations d'un Christophe Dechavanne qui semblait n'en penser pas moins.
"Je supporte plus ce mot. Il y a en a tellement d'autres dans la langue française. Et moi je vous souhaite d'aller vous faire enc*ler parce que ça peut être très chouette !", a conclu la journaliste. C'est dit !
Pourquoi ça pose problème de dire "enc*lé" ?
Car c'est une forme de violence homophobe dans une société où l'oppression passe aussi beaucoup par le choix des mots - d'où l'expression d'ailleurs "d'agression verbale". Et on aura beau l'employer mille fois, face à un match de foot, entre amis, dans les bouchons, son sens premier ne sera jamais épuisé pour autant : l'idée de considérer l'acte mis en avant comme quelque chose de forcément honteux, déshonorant, humiliant. Ca, c'est homophobe.
La linguiste et sémiologue Marie Treps l'explique très bien d'ailleurs à franceinfo : "Il n'y a aucun doute sur la dimension homophobe de cette insulte. C'est un mot qui fait image, dans lequel on entend nettement 'cul', donc il est difficile de le vider de son sens premier. La passivité supposée de la personne qui est enc*lée, qu'il s'agisse d'une femme ou d'un homme, qui confère à ce nom une dimension insultante. Le racisme, c'est considérer 'l'Autre' comme différent sur le plan de l'humanité, et même inférieur ou anormal. C'est aussi le cas de l'homophobie".
Sur Twitter, on se réjouit donc en retour de cette pique bien placée de Daphné Bürki. "Daphné Burki a une nouvelle fois prouvé à quel point elle était une solide alliée de la communauté LGBT+. Elle a toute ma gratitude. Et cela d'autant plus qu'elle fait face à des interlocuteurs qui lui reprochent de faire du "politiquement correct" ou s'emploient à minimiser la dimension homophobe du terme", se réjouit un journaliste.
"Une reine !", "Vu les torrents de merde qu'elle se prend sur la gueule, il serait peut-être bon de tous dire à Daphné Burki à quel point son soutien sans faille est inestimable ! Merci Madame !", "Heureusement qu'elle a ouvert sa gueule parce qu'on en a marre des gens qui effacent l'homophobie et la transphobie.", "Elle confirme son statut d'alliée indispensable dans la communauté LGBTQIA+", peut-on aussi lire sur le réseau.
Une belle séquence en plein Mois des fiertés.