Hot take : alors que l'on s'acharne à trouver la meilleure salle pour une qualité d'image optimale - plus grand écran, qualité IMAX, séance 3D suivant le film en question... - et si c'était le son qui comptait avant tout ? L'acoustique de la salle, mais surtout le sound design, ou "mise en son", de l'oeuvre concernée... Je suis à deux doigts de défendre cette affirmation tous les jours après ma séance historique de Furiosa !
Furiosa, ou plutôt Mad Max : Furiosa, ou plutôt Furiosa : a Mad Max Saga... Bref, le nouveau Mad Max quoi ! Qui n'est pas une suite, mais à l'inverse une préquelle du précédent opus de cette mythique saga post-apo, Fury Road. Chaque volet dont celui-ci est mis en scène par l'Australien le plus fou d'Hollywood, George Miller (à qui l'on doit, je précise, Babe et Happy Feet, c'est dire l'éclectisme du monsieur, qui n'a pas loin de 90 ans au compteur). Et les fans de cet univers polymorphe seront aux anges : apocalypse, ultraviolence, longues routes désertes, horizons infinis... Comme si western et science-fiction dystopique croisaient ce que le cinéma d'action peut proposer de meilleur.
Visuellement, c'est un bonheur : la beauté (cela faisait une éternité que je n'avais pas vu un bleu du ciel aussi beau !) côtoie le grotesque (certains personnages hauts en couleurs), le criard (des tonalités orangées à l'image qui ont un air de pellicule flambée) voire... le gore. Narrativement, c'est hyper efficace : je n'ai pas vu passer les 2h30 de film, rapides comme les bolides tonitruants qui brûlent l'asphalte.
Mais ce n'est même pas ça qui m'a le plus choqué !
Non, ce qui m'a sidéré durant cette séance de Furiosa, c'est... le son. Ce n'est pas qu'un artifice dans ce film spectaculaire, mais l'ADN même d'une expérience artistique, qui est esthétique, mais surtout puissamment auditive. Vrombissements des moteurs, qui introduisent chaque séquence, relancent l'attention, ouvrent un nouveau chapitre, crissements des pneus, explosions, bruits du bitume qui se consume... Je vous conseille plutôt deux fois qu'une de tester la chose dans la meilleure salle envisageable pour un son optimal.
Par exemple ? Le Max Linder ou le Grand Rex, si vous êtes sur la capitale. Des salles qui offrent une immersion sonore absolue. Car George Miller souhaitait réellement que les bruits des moteurs fassent vibrer les sièges. Et c'est réussi. J'ai éprouvé une sensation tout simplement extatique à chaque murmure ou hurlement mécanique. C'est aussi ça Mad Max : une oeuvre philosophique, oui, épique, mythologique, mais surtout, une plongée sans retour dans un enfer fait de ferraille, de grosses cylindrées, de tôles froissées, et j'en passe.
Et il n'est pas si courant que le son, et le son de ces machines, vous prennent autant aux tripes. C'est ce que désirait le cinéaste australien, car pour lui, motos trafiquées, bagnoles tunées et bolides dantesques (comme ce char moderne conduit par l'antagoniste, incarné par Chris Hemsworth) sont juste l'excroissance des personnages mis en scène. A mes yeux, on le ressent presque de façon viscérale quand on va voir Furiosa ! Cela mériterait un ou plusieurs Oscars...
Au tout début de l'année, j'étais ressorti tout aussi traumatisé de ma séance de La zone d'intérêt, film lui aussi très expérimental par lequel le cinéaste anglais Jonathan Glazer, récompensé aux Oscars d'ailleurs, nous fait vivre l'enfer d'Auschwitz, mais du côté des officiers nazis, et surtout, en ne montrant absolument jamais rien du camp. On ne voit rien durant 2h30. Mais on entend ! Ce n'est pas une mise en scène, c'est une mise en son : tout est suggéré par la bande sonore. Rares sont les films à accorder autant d'intérêt à cette facette. Par le passé, je sais qu'un cinéaste comme David Lynch a lui aussi beaucoup, beaucoup misé sur le son pour mettre son public en transe.
Et c'est une raison de plus pour aller voir Furiosa : je vous assure que ce n'est pas qu'un blockbuster, ou même un film tout court... Non, c'est une expérience !